Les Predador files, une enquête publiée en octobre 2023 et coordonnée par le réseau médiatique European Investigative Collaborations (EIC), exposaient la prolifération des technologies de surveillance dans le monde et l’incapacité des gouvernements et de l’Union européenne à réglementer dûment ce secteur. L’alliance Intellexa, une association entre plusieurs entreprises européennes, a fourni une forme de logiciel espion hautement intrusif, nommé Predator, à des États du monde entier et a permis le ciblage illégal de militant·e·s, de journalistes, d’universitaires et de personnalités politiques.

Le Security Lab d’Amnesty International a collaboré, en tant que partenaire technique, à l’enquête des Predator files. Dans le cadre de cette collaboration, nous avons examiné des documents techniques, des ressources de marketing et d’autres dossiers de l’alliance Intellexa datant de 2007 à 2022 et avons étudié les conséquences en matière de droits humains des outils de surveillance ciblée et de masse. Amnesty International a également mené une enquête de criminalistique pendant plusieurs mois, qui a permis d’identifier des membres de la société civile et des personnalités politiques du monde entier ayant été la cible du logiciel espion Predator.

Qu’avons-nous découvert ?

Nos recherches ont mis au jour l’alliance Intellexa, un groupe d’entreprises et de marques ayant créé et mis sur le marché un arsenal de produits de surveillance, y compris des logiciels espions hautement intrusifs comme Predator, des plateformes de surveillance de masse et des systèmes de surveillance « tactique » destinés à cibler et intercepter les appareils à proximité. Les Predador files démontrent la présence de produits de l’alliance Intellexa dans au moins 25 pays dans le monde, dont l’Égypte, la Libye, Madagascar, l’Arabie saoudite, le Viêt-Nam et la France, entre autres.

Dans notre rapport intitulé Predator. La menace mondiale d’un logiciel espion « réglementé par l’Union européenne », nous mettons au jour une opération de surveillance ayant des liens avec le Viêt-Nam et ayant ciblé au moins 50 comptes de réseaux appartenant à 27 personnes et 23 institutions, parmi lesquelles la présidente du Parlement européen Roberta Metsola, la présidente de Taiwan Tsai Ing-Wen, le député Michael McCaul et le sénateur John Hoeven, tous deux Américains, l’ambassadrice de l’Allemagne aux États-Unis Emily Haber, et l’eurodéputé français Pierre Karleskind.

Nous fournissons également une analyse approfondie des technologies de surveillance vendues par l’alliance Intellexa et offrons une étude de cas extrêmement utile sur le vaste éventail de technologies intrusives proposées par le secteur de la surveillance, notamment un récapitulatif de la manière dont les technologies telles que les exploitations de faille, les logiciels espions, le matériel informatique tactique et la technologie de surveillance de masse sont exploitées par des clients gouvernementaux de l’industrie de la surveillance pour suivre leurs cibles.

Recherche

Assistance criminalistique

Le Security Lab a examiné les appareils de journalistes et de membres de la société civile identifiés comme cibles potentielles de Predator. Nous avons partagé des renseignements sur les menaces pour la vie privée concernant de possibles clients du logiciel espion Predator avec des partenaires de la société civile travaillant sur la criminalistique afin d’aider à orienter notre travail collectif en vue d’identifier les utilisations abusives de ce logiciel espion.

L’ensemble d’outils Mobile Verification Toolkit (MVT – boîte à outils de vérification mobile) contribue aux enquêtes criminalistiques sur les téléphones mobiles. Dans le cadre des Predator files, le Security Lab a publié des indicateurs de compromission pour la MVT afin d’aider les organisations de la société civile dans le monde à identifier d’autres cas d’utilisation abusive du logiciel espion Predator.

« Nous avons une nouvelle fois des preuves de l’utilisation de puissants outils de surveillance pour lancer des attaques éhontées.
Ce sont cette fois des journalistes en exil, des personnalités politiques et des responsables intergouvernementaux qui ont été pris pour
cible. Mais ne nous méprenons pas : ce sont chacun et chacune d’entre nous, nos sociétés, la bonne
gouvernance et les droits humains de chaque individu qui en sont les victimes. »

Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International
Donncha Ó Cearbhaill, responsable du Security Lab d’Amnesty International, a présenté nos conclusions et appels à la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures le 26 octobre.

Rendez-vous sur notre page Campagnes pour en savoir plus sur nos appels.